Depuis 2017 et le mouvement #MeToo, nos chaînes d’information et nos réseaux sociaux se remplissent chaque jour de nouvelles révélations d'actes de violence sexuelle subis par des femmes, mais aussi des enfants et parfois des hommes, pendant les dernières décennies. La parole se libère et n’hésite pas à condamner, sans prescription. Dans le contexte de la cancel culture – culture de l’annulation, de réparation des injustices faites aux minorités, aux vaincus, aux femmes – ce mouvement conduit inévitablement à la révision de notre comportement, de notre vision sur la société et sur l’histoire. Il nous invite à repenser nos repères culturels : faut-il lire encore une littérature sur le viol ? Faut-il s’émerveiller encore devant les innombrables statues et peintures qui, dans nos musées, montrent les origines légendaires de nos civilisations – comme le viol du dieu Mars sur la vierge Rhéa Silvia, dont nous avons déjà parlé dans ce podcast ?
Que faire des Métamorphoses d’Ovide et des nombreuses jeunes femmes et jeunes hommes qui, pour échapper aux dieux, choisissent la mort ou la transformation en plantes, animaux, constellations ? Que faire de ce mythe de la vie et de la mort, que l’on voit illustrer sur les tombes, dans les temples et dans les maisons grecques et romaines, ce mythe qui donnait l’espérance du salut à tous ceux qui s’initiaient dans les mystères d’Eleusis et qui résonne dans toute la littérature antique, par les noms d’Hadès/Pluton, dieu souterrain de l’Enfer, et de Perséphone/Proserpine, fille de Déméter/Cérès, déesse de la végétation ? Faut-il condamner, avec les violences sexuelles, tout un pan de la culture européenne qui a expliqué le miracle de la renaissance printanière de la nature par le retour sur terre de Perséphone/Proserpine, graine devenue jeune pousse ?
Pour parler de ces questions passionnantes et douloureuses, nous accueillons aujourd'hui trois invité·es : Benjamin Demassieux, Néphéli Papakonstantinou et Alix Barbet.
Invité·es :
Benjamin Demassieux : Professeur agrégé de Lettres classiques dans l’Académie de Lille, doctorant à l’Université de Lille, rattaché au laboratoire HALMA - UMR 8164 - Histoire, Archéologie et Littérature des Mondes anciens. Sa thèse porte sur la poétique du rapt dans la poésie gréco-latine tardive (IVe-VIe siècle).
Néphéli Papakonstantinou : docteure en études latines, spécialiste de droit romain, auteure d'une thèse consacrée à la "Pratique déclamatoire et enjeux juridiques dans les Déclamations mineures du Pseudo-Quintilien : la codification du crimen raptus".
Alix Barbet: archéologue, directrice de recherche honoraire au CNRS à l’ENS, éminente spécialiste de peinture romaine et auteure de la base de données "Décors antiques" qui compile des photographies de peintures murales et de décors romains depuis 1963 : https://archeo.ens.fr/Decors-antiques.html
Animation, réalisation et publication : Emile Gayoso.
Responsable scientifique : Anca Dan.